15 décembre 2018

La COP24 oublie la dimension sociale de la transition

Cette COP24 devait aboutir à l’élaboration de règles permettant à l’accord de Paris de devenir opérationnel sur le terrain. Cela est indispensable pour rester sous 1.5°C de réchauffement climatique, une limite elle-même cruciale pour continuer les efforts de lutte contre la pauvreté. Les résultats sont plutôt décevants: le rapport du GIEC n’a pas été intégré aux cycles de rehausse des contributions nationales prévues sous l’accord de Paris. Les Etats n’ont pas eu le courage politique de prendre les mesures nécessaires pour entraîner un cycle ambitieux. Ne pas agir aujourd’hui est immoral, comme l’a rappelé en milieu de semaine le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres à la tribune de la COP24. Cette inaction est inacceptable et engendre déjà des violations des droits et des impacts humains.

D’autre part, ne pas réduire drastiquement ses émissions aujourd’hui, c’est assumer le risque de devoir se tourner vers des technologies de séquestration, de compensation, de géo-ingénierie plus tard. Ces technologies ne sont pas disponibles, dangereuses et vont engendrer des violations de droits humains d’une ampleur inédite. Ce n’est pas le monde dans lequel nous voulons vivre. Et pour éviter que ces mesures qui émergent déjà n’entraînent une crise humaine et humanitaire plus grave encore, il est indispensable que les politiques climatiques soient fondées sur les droits humains. Ce n’est pas une contrainte supplémentaire, c’est la garantie d’avoir une transition inclusive, acceptée, et plus efficace. Or les Etats ont refusé d’intégrer les principes du préambule de l’accord de Paris tels que les droits de l’Homme, la sécurité alimentaire, l’exigence d’une transition juste ou encore la nécessité de la participation publique à ce manuel d’application, ce à quoi ils s’étaient pourtant engagés lors de la COP21.

Ce refus s’accompagne d’une limitation du périmètre des contributions nationales à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, sans prendre en compte l’adaptation aux changements climatiques ou la contribution aux financements de la transition des pays les moins responsables et les plus impactés. Cela veut dire que, bien que le sujet de la transition juste ait été au cœur des discussions, et au moment où les débats nationaux français soulevés par la crise des gilets jaunes ont été au cœur des discussions de la COP24, les Etats ont fait le choix de se limiter à une approche purement comptable. Les politiques climatiques requièrent une approche holistique, intégrant les objectifs d’éradication de la pauvreté, de lutte contre la faim, et répondant à l’objectif de ne laisser personne de côté. L’actualité nous a rappelé que les mesures permettant la transition écologique doivent absolument être inclusives, s’accompagner d’une lutte contre les inégalités et être socialement justes: cela veut dire que ceux qui ont le plus émis, que ce soit les pays développés au niveau global, ou les plus riches au niveau de chaque pays, doivent être les premiers à réduire leurs émissions. C’est un enjeu de justice climatique.

 

Pour en savoir plus sur l’action climatique ancrée sur les droits humains, découvrez le rapport de l’alliance Climate, Land, Ambition and Rights Alliance, dont le Secours catholique – Caritas France fait partie.

 

Article rédigé par Sara Lickel, chargée de plaidoyer sur les changements climatiques au Secours catholique – Caritas France

Photo par Lucile Dufour

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