23 septembre 2015

Appel de la société civile aux gouvernements

Appel public à tous les chefs d’État du monde à l’occasion du Sommet des Nations unies sur le développement durable, septembre 2015

Nous, citoyens du monde, nous unissons nos voix dans un appel commun à tous les chefs d’État réunis à New York du 25 au 27 septembre 2015 lors du Sommet des Nations unies où seront adoptés de nouveaux objectifs mondiaux pour le développement durable, 70 jours seulement avant la date critique de la vingt et unième Conférence des Parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques à Paris.

Nous sommes tous d’accord:

Nous pouvons combler l’inégalité criante entre les quelques-uns qui possèdent près de la moitié de la richesse mondiale et le reste de l’humanité.

Nous pouvons assurer la pleine égalité entre les hommes et les femmes.

Nous pouvons garantir le droit à l’alimentation pour des milliards de personnes, en particulier les petits producteurs qui produisent l’essentiel de l’alimentation dans le monde mais dont la plupart voient leur droit à l’alimentation bafoué.

Nous pouvons contenir la hausse de la température mondiale en dessous de 1,5° Celsius.

Nous pouvons faire en sorte que les plus pauvres et les plus vulnérables soient protégés et soutenus dans leur lutte pour l’adaptation aux changements climatiques et participent à une société mondiale plus juste et plus équitable.

Nous pouvons mettre fin à notre relation d’exploitation avec la terre et à l’extraction illimitée des ressources naturelles.

Nous pouvons transformer la culture de domination, de consommation et d’extractivisme en une culture de suffisance, compassion et solidarité.

Nous pouvons assurer une transition juste vers une économie où le travail décent pour tous est garanti et où le temps consacré à l’attention aux personnes est valorisé.

Nous pouvons créer un monde où les femmes et les hommes peuvent vivre, penser, s’exprimer et se déplacer en toute liberté et en paix.

À de nombreuses reprises dans l’histoire, la communauté internationale a montré qu’elle pouvait surmonter ses divisions et s’unir pour répondre à des menaces importantes et construire un monde de paix, de justice environnementale, climatique, économique et sociale où les hommes et les femmes sont égaux. Nous vivons maintenant l’un de ces moments.

Au cours des quatre dernières années, nous avons assisté à un niveau sans précédent de discussions, de consultations et de mobilisation dans la préparation des nouveaux objectifs mondiaux. Les débats ont été caractérisés par un véritable espoir que la communauté internationale allait relever le défi de s’attaquer aux problèmes de fond plutôt que de continuer à faire ce qui est économiquement avantageux et politiquement viable.

«Transformer notre monde: L’Agenda 2030 pour le développement durable » vise à répondre aux défis les plus urgents d’aujourd’hui. Il expose une vision d’un monde où toute vie peut prospérer. Il propose à juste titre un programme universel qui reconnaît l’interdépendance des objectifs économiques, sociaux et environnementaux. Il est construit sur la reconnaissance explicite des droits humains et contient des objectifs valables pour éradiquer la pauvreté, assurer l’égalité entre les sexes, réduire les inégalités, réaliser des modèles de consommation et production durables, et lutter contre la déforestation et les changements climatiques. La mise en oeuvre de ces objectifs et l’obligation de rendre compte aux citoyens du monde entier permettront de déterminer leur pertinence dans la réponse apportée aux crises actuelles.

Mais répondre aux crises signifie reconnaître et s’attaquer aux limites, lacunes et incohérences que l’on peut trouver dans les objectifs de développement durable (ODD). En particulier, les ODD ne résolvent pas la contradiction entre la recherche de l’harmonie avec la nature et la priorité accordée à une croissance soutenue pour toutes les nations. Les objectifs impliquent la poursuite de la compétition pour des ressources naturelles limitées et, par conséquent, de nouvelles hausses des émissions de gaz à effet de

serre. Ils ne s’attaquent pas aux règles mondiales injustes de la finance, de la fiscalité, du commerce et des investissements, essentiels pour parvenir à la transformation structurelle nécessaire si l’on veut s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et des inégalités. Nous avons besoin de plus d’ambition dans ces domaines critiques pour parvenir à une véritable transformation de notre monde !

Nous sommes solidaires avec les personnes et les communautés qui développent des solutions et des alternatives de vie basées sur les notions de bien-être, de soin envers les autres et de prospérité partagée. Elles contribuent au monde que nous devrions tous aspirer à créer! Qu’il s’agisse de petits producteurs qui pratiquent l’agro-écologie et construisent des systèmes alimentaires locaux ou bien de communautés pratiquant une économie sociale et solidaire; de femmes émancipées qui ont transformé leurs communautés ou de communautés qui utilisent un système de production décentralisé et communautaire d’énergie renouvelable; nous sommes inspirés par l’innovation et la vision de ces personnes à travers le monde.

Nous sommes inspirés par le nombre croissant de dignitaires religieux de par le monde qui continuent de dénoncer les changements climatiques Changeons pour la planète – Prenons soin de l’humanité », où des personnes s’engagent à consommer de manière durable ainsi que dans des actions politiques. Ces initiatives prouvent que les gens sont prêts à changer. 1. Dans sa Lettre encyclique « Laudato Si’ sur la sauvegarde de la maison commune » publiée en mai 2015, le Pape François appelle à une « conversion écologique ». Il propose un programme d’action pour une transformation en profondeur de notre relation avec l’environnement, et de la façon dont nous organisons notre vie sociale, économique et politique. Entendant les appels à un changement de mode de vie, les personnes font preuve de leur empressement à relever ce défi. Des initiatives citoyennes fleurissent dans le monde entier, telle la campagne «

Nous appelons donc ceux et celles réunis à l’ONU pour le Sommet sur le développement durable à aller plus loin pour soutenir la quête commune de protéger notre planète partagée et l’humanité. Nous vous demandons de:

– Fixer des limites à l’extraction des ressources naturelles et de se mettre d’accord pour un partage équitable des ressources naturelles. Renforcer les efforts à la base pour protéger la biodiversité. Mettre un terme aux investissements dans l’agriculture industrielle. Soutenir et renforcer les systèmes alimentaires locaux et l’agro-écologie.

– Résister à l’influence des puissants intérêts privés dont la recherche du profit empêche la transformation de nos sociétés. Fixer des limites au pouvoir des sociétés transnationales à influencer les politiques publiques. Exiger la transparence des transactions, privées et publiques. Adopter un traité mondial visant à faire respecter les responsabilités des droits humains des entreprises !

– Supprimer le financement de l’énergie sale et rediriger les ressources vers la production d’énergie renouvelable décentralisée et communautaire. Reconnaître l’existence de la dette écologique dont le remboursement est dû depuis longtemps.

– Transformer le système financier pour soutenir l’émergence d’alternatives véritablement durables. Réformer les politiques fiscales pour redistribuer les richesses.

– Réformer les systèmes qui excluent la majorité des pays du monde de déterminer des règles globales sur la fiscalité, le commerce et dans d’autres domaines qui ont un lourd impact sur leurs populations. Permettre et renforcer le pouvoir des producteurs de denrées alimentaires, des travailleurs, des peuples autochtones, des migrants et des dirigeants communautaires locaux de s’organiser et de parler en leur nom à la table des négociations. Renforcer le pouvoir des femmes qui souffrent de discrimination et d’obstacles à la participation.

Les hommes et les femmes sont prêts à s’inscrire dans un avenir où le plus important est l’égalité, l’équité, les droits et une vie en harmonie avec la nature. Nous, soussignés, nous nous engageons à accompagner les personnes dans cet effort, en prenant nous mêmes des mesures, petites et grandes. Nous vous demandons de marcher avec nous et toutes les personnes qui se lancent dans cette nouvelle aventure ! Assumez le leadership que ce moment historique exige !

Liste des signataires

1. Dereje Alemayehu, World Citizen and Tax Justice Activist, Ethiopia

2. Marcia Anfield, Mariannridge Coordinating Committee, South Africa

3. Attilio Ascani, Director, Focsiv, Italy

4. Georges Bach, Member of the European Parliament, Luxembourg

5. Chris Bain, Director, CAFOD, UK/England & Wales

6. Fr. Dário Bossi, Comboni Missionary, International Alliance of those Affected by Vale, Brazil

7. Jenny Boyce-Hlongwa,Coordinator, Mariannridge Coordinating Committee, South Africa

8. Adriano Campolina, Chief Executive, ActionAid International

9. Marian Caucik, Director, eRko, Slovakia

10. Alistair Dutton, Director, SCIAF, UK/Scotland

11. Hilal Elver, Professor of law, Turkey; and UN Special Rapporteur on the Right to Food

12. Simone Filippini, Director, Cordaid, The Netherlands

13. Susan George PhD, President, Transnational Institute, The Netherlands

14. Patrick Godar-Bernet, Director, Bridderlech Deelen, Luxembourg

15.Mamadou Goïta, Executive Director, Institut de Recherche et de Promotion des Alternatives de Développement en Afrique (IRPAD), Mali

16. Bishop Theotonius Gomes, Auxiliary Bishop Emeritus of Dhaka, Federation of Asian Bishops’ conferences, Bangladesh

17. Rev. Fletcher Harper, Executive Director, Greenfaith, USA

18. Lieve Herijgers, Director, Broederlijk Delen, Belgium

19. Jason Hickel, Lecturer, London School of Economics and Political Science, UK

20.Wael Hmaiden, Executive Director, CAN International, Lebanon

21. Heinz Hödl, CIDSE President and Director, KOO, Austria

22. Archbishop Jean-Claude Hollerich, Archbishop of Luxembourg

23. Nicolas Hulot, Special Envoy of the President of the French Republic for the Protection of the Planet, France

24. Pa Ousman Jarju, Minister of Environment, Climate Change, Water Resources, Parks & wildlife, The Gambia

25. Bishop Aloys Jousten, Honorary Bishop of Liège, Belgium

26. David Leduc, Executive Director, Development and Peace, Canada

27. Jorge Libano Monteiro, Administrator, FEC – Fundação Fé e Cooperação, Portugal

28. Bill McKibben, Co-founder 350.org, USA

29. Eamonn Meehan, Director, Trócaire, Ireland

30. Daniel Misleh, Executive Director, Catholic Climate Covenant, USA

31. Bhumika Muchhala, Senior Policy Analyst, Finance and Development, Third World Network, Malaysia

32. Fr. Stan Muyebe, Justice and Peace Commission, Southern Africa Catholic Bishops Conference, South Africa

33. Kumi Naidoo, Executive Director, Greenpeace International, South Africa

34. Bernd Nilles, Secretary General, CIDSE, Belgium

35. Allen Ottaro, Executive Director, Catholic Youth Network for Environmental Sustainability in Africa (CYNESA), Kenya

36. Peter-John Pearson, Director, Southern African Catholic Bishops’ Conference Parliamentary Liaison Office, South Africa

37. Bernard Pinaud, Director, CCFD-Terre Solidaire, France

38. Viviane Reding, former Vice-President of the European Commission and Member of the European Parliament, Luxembourg

39. Susana Réfega, Executive Director, FEC – Fundação Fé e Cooperação, Portugal

40. Cécile Renouard, Philosopher and Economist, France

41. Patrick Renz, Director, Fastenopfer, Switzerland

42. Andy Ridley, Managing Director, Circle Economy, The Netherlands

43.Michel Roy, Secretary General, Caritas Internationalis, Vatican City

44. Jeff Rudin, Secretary, Alternative Information and Development Centre, South Africa

45.Naderev « Yeb » Saño, Leader of The People’s Pilgrimage for Climate Action, OurVoices, Philippines

46. Angelo Simonazzi, Secretary General, Entraide et Fraternité, Belgium

47. Colette Solomon, Director, Women on Farms’ Project, South Africa

48. Pablo Solón, Executive Director, Fundación Solón, Bolivia

49. Pirmin Spiegel, Director, Misereor, Germany

50. Soledad Suárez Miguélez, President, Manos Unidas, Spain

51.Monicah Wanjiru, General Secretary, International Coordination of Young Christian Workers, Italy

Lire cette déclaration en anglais

Pour aller plus loin, découvrez l’interview d’Emilie Johann

1 Voyez http://www.interfaithpowerandlight.org/resources/religious-statements-on-climate-change/ pour une liste complète des déclarations selon les religions et les déclarations interconfessionnelles.

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