10 juillet 2015

Contre la faim : droits de l’homme et mobilisation citoyenne – Une lecture de la Lettre encyclique Laudato si’

Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), José Graziano da Silva, a salué l’Encyclique Laudato si’ dès sa sortie1. De fait, le pape François est préoccupé par la faim dans le monde, comme en attestent ses interventions régulières à la FAO ainsi que la campagne mondiale « Une seule famille humaine, de la nourriture pour tous », portée par Caritas Internationalis, qu’il avait inaugurée le 10 décembre 20132. Ce fléau est mentionné dans l’Encyclique :

« On affirme, en langage peu académique, que les problèmes de la faim et de la misère dans le monde auront une solution simplement grâce à la croissance du marché. Ce n’est pas une question de validité de théories économiques (…) mais de leur installation de fait dans le développement de l’économie. Ceux qui n’affirment pas cela en paroles le soutiennent dans les faits quand une juste dimension de la production, une meilleure répartition des richesses, une sauvegarde responsable de l’environnement et les droits des générations futures ne semblent pas les préoccuper. Par leurs comportements, ils indiquent que l’objectif de maximiser les bénéfices est suffisant. Mais le marché ne garantit pas en soi le développement humain intégral ni l’inclusion sociale. »

Le pape François pointe le fait que la faim est, d’abord, un problème politique et social, comme l’avait souligné José de Castro dans Géopolitique de la faim, dès 1952 : « La faim, c’est l’exclusion. Exclusion de la terre, du revenu, du travail (…) et de la citoyenneté. Quand une personne arrive au point de ne plus rien avoir à manger, c’est que tout le reste lui a été dénié. »

Un développement basé sur le respect des droits humains

Œuvrant pour la plus haute dignité humaine, l’enseignement social de l’Église fait aujourd’hui cause commune avec les Nations unies  pour la reconnaissance et la réalisation des droits de l’Homme3 par les Etats à l’échelle internationale.

Après avoir, une fois encore, souligné les inégalités criantes d’un monde opulent, l’Encyclique dénonce que « nous continuons à admettre en pratique que les uns se sentent plus humains que les autres, comme s’ils étaient nés avec de plus grands droits. » (§90, p.71). Pourtant, inhérents à toute personne humaine du seul fait de son existence, les droits humains sont acquis par tous de la même manière sans discrimination et sans primauté.

Civils, politiques, économiques, sociaux ou encore culturels ces droits fondamentaux sont essentiels au respect de la dignité de chacun. En ce sens, et comme ses prédécesseurs, le pape François réaffirme également qu’« un type de développement qui ne respecterait pas et n’encouragerait pas les droits humains, personnels et sociaux, économiques et politiques, y compris les droits des nations et des peuples, ne serait pas non plus digne de l’homme ».

En effet si le développement économique et social peut permettre de garantir le respect et la mise en œuvre des droits humains et d’une vie digne  (accès à la nourriture, au logement, à la santé, à l’éducation, etc.), seul un développement économique et social basé sur les droits humains peut garantir un développement équitable et durable pour tous.

En ce sens, et au titre des droits culturels, le pape accorde également dans son Encyclique une grande attention aux aspects culturels du développement, notamment à l’importance de respecter les cultures locales (§146, p.113-114) et de faire participer les populations aux décisions qui les concernent. La notion de qualité de vie par exemple, « ne peut être imposée, mais elle doit se concevoir à l’intérieur du monde des symboles et des habitudes propres à chaque groupe humain » (§ 144, pp.112-113). Ainsi, reconnaissant le caractère fondamental des droits économiques, sociaux et culturels au même titre que pour les droits civils et politiques, l’Église encourage à l’instar de nombreuses sociétés civiles nationales4 et internationales5, le respect et la mise en œuvre des conditions d’un vrai développement, au service de la liberté et de l’autonomie des individus.

Lire la suite – Des droits économiques sociaux et culturels au service de la lutte contre la faim

4 Rapport contradictoire de la société civile française sur la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels en France, janvier 2015. Ce rapport a été coordonné par Anaïs Saint-Gal (Terre des Hommes France).

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